Francis Scott Fitzgerald


25 novembre 2013 2013

Grande Salle

Lorsqu'on arrive sur les quais où sont amarrés les navires, derrière des hangars à toits plats, on se trouve dans un pays qui n'est déjà plus celui d'où l'on vient, pas encore celui où l'on va. Les bruits assourdissants tournent sous les verrières jaunâtres. On entend le roulement sec des trains de marchandises, le déferlement des chariots à bagages, le sifflement strident des grues, et l'odeur salée de la mer vous suffoque. Même si rien ne vous presse on se sent obligé de se dépêcher. Le continent qu'on laisse derrière soi représente le passé. L'avenir prend l'aspect des soutes béantes, ouvertes dans le flanc des navires. Dans leur tumulte et leur agitation confuse, les quais tiennent lieu de présent.
Tout change, dès qu'on a franchi la passerelle. Le monde rétrécit. On devient citoyen d'une république plus étroite que celle d'Andorre. On perd toute assurance. Les cabines paraissent étranges, les hommes qui occupent le bureau du commissaire de bord plus étranges encore. Dans le regard des autres voyageurs et dans celui de leurs amis, on ne lit que distance et mépris. La sirène lance alors son hurlement lugubre.



Tendre est la nuit.




Francis Scott Fitzgerald est né en 1896 dans le Minnesota. Son père est d'origine modeste, et sa mère, fille d'un homme d'affaires d'origine irlandaise, a parcouru l'Europe pour parfaire son éducation. Juste avant sa naissance ses parents perdent deux filles, il écrira plus tard « Je pense que c'est à partir de ce moment-là que je commençais d'être un écrivain.»  Il quitte l'université de  Princeton sans diplôme. En 1917, Fitzgerald qui rêve de gloire s'engage dans l'armée lorsque les Etats-Unis entrent en guerre. En 1918, il est envoyé près de Montgomery où il tombe amoureux de Zelda Sayre, une jeune femme excentrique et brillante. Pour elle il écrit son premier roman publié en 1920 sous le titre L'Envers du paradis. Tous deux partent s'installer à Paris puis sur la cote d'Azur, comme c'est alors le cas de nombreux Américains. Il écrit Gatsby le Magnifique dont il confie la lecture du manuscrit à Hemingway, alors jeune journaliste. De retour à Hollywood en 1926, alcoolique, dépressif, miné par la schizophrénie de sa femme, il achève d'écrire Tendre est la nuit. Fitzgerald meurt 1940 à Hollywood, pauvre et au milieu de l'indifférence à peu près générale. Sa vie, qui est associée aux années folles de la « génération perdue », est devenue légendaire.