Irène Nemirovsky


1er février 2016 2016

Grande Salle

« Dois-je défaire les valises des enfants ? Quand repartons-nous ?
– Mais nous sommes arrivés, dit Nicolas Alexandrovitch. Pourquoi veux-tu repartir ?
– Je ne sais pas, murmura-t-elle avec une expression absente et lasse, je pensais… »
Elle soupira, écarta les bras, dit à voix basse :
« C’est bien.



Irène Némirovsky, Les Mouches d'automne, Grasset, 1931, p.34


Animé par Paula Jacques



Née en 1903 à Kiev, en Ukraine, Irène Némirovsky passe une enfance esseulée, avec le réconfort des livres. Elle a quinze ans quand la révolution la chasse de Russie avec sa famille. À dix-huit ans, elle publie à Paris ses premiers contes. Elle mène une vie indépendante durant les années folles puis se marie avec Michel Epstein et, en 1929, donne naissance à sa première fille. Un mois plus tard elle publie David Golder, un roman qui fait sa renommée, aussitôt traduit dans le monde entier et porté à l’écran par Julien Duvivier. Une dizaine de romans et de nombreuses nouvelles suivront, dictés par son environnement familial, le souvenir d’être russe, l’étrangeté d’être juive, la volonté d’être française. Irène Némirovsky n’a jamais nié qu’elle était juive, mais elle ne s’en fait pas gloire, et reçoit le baptême en 1939, à défaut de la nationalité française. Du Bal (1929) aux Chiens et les Loups (1940), elle ne cesse pourtant d’inviter dans son œuvre ces personnages d’étrangers indésirables, sans pitié mais non sans tendresse, et présente à la France des années 30 le miroir déplaisant de sa xénophobie. Au risque, parfois, d’être mal interprétée. Réfugiée en 1940 dans un village du Morvan, apatride au regard de la loi, elle est arrêtée le 13 juillet 1942 par la police, puis déportée à Auschwitz où elle est assassinée. Suite française sera publié plus de soixante ans plus tard par ses filles, la faisant redécouvrir au lectorat contemporain.



Auteur, traducteur et éditeur, Olivier Philipponnat a co-écrit avec Patrick Lienhardt La Vie d’Irène Némirovsky (Grasset/Denoël, 2007). Il a été commissaire de l’exposition Irène Némirovsky au Mémorial de la Shoah: « Il me semble parfois que je suis étrangère ».