Gemelos

d'après le roman Le grand cahier d'AGOTA KRISTOF
dramaturgie et mise en scène LA TROPPA
du 11 mai 2001 au 31 mai 2001
Ateliers Berthier - Petite Salle



avec Laura Pizarro, Jaime Lorca, Juan Carlos Zagal

En 1956, la jeune Agota Kristof quitte sa Hongrie natale et se réfugie en Suisse. Trente ans après, elle publie aux éditions du Seuil son premier roman, écrit dans la langue de son exil : Le grand cahier. Ce très beau texte se donne pour le journal intime, tenu par des frères jumeaux, de leur vie de réfugiés auprès d'une effroyable grand-mère, loin des villes ravagées par une guerre sans nom. Sous les coups et les insultes, les héros découvrent vite que la survie est aussi affaire d'invention, voire d'exercices pratiques - terriblement pratiques, jour après jour, pour endurcir l'âme, le corps et jusqu'à l'écriture face à la vérité, fût-elle atroce. Cette découverte, les deux enfants la poussent à ses ultimes conséquences, qu'ils appliquent et décrivent avec une opiniâtreté et un courage bouleversants. Aussitôt salué par la critique et le public, Le grand cahier fut rapidement traduit en une vingtaine de langues, dont l'espagnol. Et c'est ainsi qu'il tomba quelques années plus tard entre les mains d'un membre de La Troppa, une compagnie chilienne experte en adaptations de récits initiatiques et fabuleux. Du Grand cahier, les comédiens de La Troppa ont tiré un spectacle dont la magie est typique de leur manière : jouant des perspectives et des effets d'échelle en maîtres consommés du théâtre d'illusions, sans autres complices que quelques masques et marionnettes, ils incarnent à eux trois tous les personnages de la fable au point de se faire oublier derrière la foule qu'ils animent. Le résultat, entre le conte populaire et les archives de Nuremberg(Michel Cournot), a enchanté le Festival d'Avignon. Le théâtre est vie, quelles que soient les circonstances. Le théâtre doit se faire parce qu'il est folie pure. Si lui n'est pas vrai, rien ne l'est. Nous voulons croire qu'il est vrai. Nous avons tous un grain de folie douce, de belle folie. Même s'il tombe vingt mille bombes atomiques, il se trouvera peut-être deux types à vingt mètres en train de faire du théâtre, sous terre, dans un bunker. C'est pour cela que le théâtre ne va pas mourir.

Lire aussi :
Agota Kristof : Le grand cahier, La preuve, Le troisième mensonge, éd. du Seuil, 1995.