Chères spectatrices, chers spectateurs,
Voilà exactement un an que nous vivons au rythme des confinements et des couvre-feux, et voilà plus de dix jours que le théâtre de l’Odéon est occupé, à l’initiative de la CGT, par des professionnels du monde de la culture. L’extension du mouvement à de nombreux autres lieux traduit la vive inquiétude qui traverse actuellement tout notre secteur.
Je partage cette inquiétude et soutiens pleinement la demande d’une prolongation de l’«année blanche» pour les intermittents du spectacle.
La possibilité de maintenir les processus de répétitions a permis à certaines équipes de travailler, mais combien sont-ils à avoir vu toutes leurs dates annulées depuis un an ?
À l’Odéon, nous préparons, sans visibilité sur notre fin de saison, le programme de la saison prochaine, où nous essayons de reporter les nombreux spectacles annulés, tout en maintenant au maximum les nouveaux projets que nous avions. Mais il va sans dire que les annulations et reports de cette année vont impacter fortement la saison prochaine, et par un effet domino nous obliger à décaler à plus long terme certains de ces projets.
Cela signifie, à l’échelle de tout le secteur du spectacle vivant, que de très nombreux projets vont soit disparaître complètement, soit être encore décalés d’une année ou plus. Et il n’est pas du tout certain que celles et ceux qui ont eu la chance de travailler cette année puissent faire leurs heures et recharger leurs droits la saison prochaine.
C’est dans ce contexte que la prolongation de l’«année blanche», heureusement décrétée par le gouvernement en mai dernier, paraît indispensable. C’est ce dispositif qui a permis à de nombreux professionnels du spectacle vivant de se maintenir dans le régime de l’assurance chômage depuis un an, et qui doit leur permettre de passer le cap d’une année qui s’annonce encore très difficile, même si les théâtres reprennent enfin une vie plus ou moins normale. Il en va de la survie de nombreux artistes, techniciens et techniciennes intermittents, qu’ils ou qu'elles travaillent régulièrement dans les grandes institutions ou en compagnie. Je veux croire que la commission Gauron qui examine actuellement cette question prendra toute la mesure d’une situation que chaque nouveau jour de fermeture dégrade un peu plus.
Il est évident que les intermittents du spectacle sont loin d’être les seuls à être gravement impactés par les conséquences économiques de la crise sanitaire, mais personne ne doit rester au bord de la route.
Espérons que nous retrouverons vite cette visibilité qui nous manque tant, et qui nous laisserait apercevoir enfin le bout du tunnel.
Stéphane Braunschweig, 15 mars 2021
directeur de l'Odéon-Théâtre de l'Europe