Die gelbe Tapete

[Le Papier peint jaune]

d'après Charlotte Perkins Gilman
mise en scène Katie Mitchell
 



1h20

du 20 au 26 septembre 2013 2013

Berthier 17e

avec Iris Becher, Judith Engel, Cathlen Gawlich, Ursina Lardi,Tilman Strauß, Luise Wolfram
et Andreas Hartmann, Stefan Kessissoglou (caméras)

Prise au piège.
Le Papier peint jaune est un texte encore trop peu connu en France, malgré de belles traductions récentes. Son auteur, Charlotte Perkins Gilman, fut l’une des principales militantes de la cause féministe au tournant du XXème siècle. En 1890, quelques années après avoir souffert un épisode aigu de dépression postnatale, elle écrivit en deux jours une nouvelle destinée à régler quelques comptes avec le pouvoir masculin et médical : sous prétexte de lui prescrire une «cure de repos», un savant docteur spécialiste des affections nerveuses avait failli la faire basculer tout à fait dans la démence… De cette sinistre expérience de privation sensorielle et intellectuelle, Gilman tira un récit devenu classique : le journal intime tenu par une jeune mère que son époux, qui est aussi son médecin, enferme pour son bien dans une pièce sombre et défraîchie, entièrement tapissée d’un vieux papier peint jaune à motifs. Peu à peu, surmontant son dégoût initial, l’héroïne anonyme s’attache à examiner ce papier, à y distinguer des formes, puis des présences en mouvement… Mitchell a choisi de s’attarder sur cette souffrance parfois mal connue et reconnue aujourd’hui encore, ce moment de la vie où une femme, fragilisée par la maternité, peut se sentir comme prise au piège des rôles familiaux et sociaux qui lui sont proposés. Pour cela, la metteuse en scène a d’abord fait transposer la nouvelle dans le Berlin du XXIème siècle. Elle a ensuite mobilisé les ressources dramatiques et plastiques qui ont fait sa réputation. Le récit de Gilman se double ici d'une autre action, celle des caméras qui le captent, de la bruiteuse qui fabrique sous nos yeux les ambiances sonores, du monteur vidéo élaborant en direct le film de la représentation projeté sur grand écran. Enfin, à la pullulation techno-schizoïde des espaces et des événements (théâtraux / cinématographiques, produits / postproduits, montrés / projetés), Katie Mitchell a ajouté le dédoublement de son héroïne, nommée Anna : ses pensées sont énoncées à voix haute par Ursina Lardi ; son corps, ses gestes, ses émotions sont confiés à Judith Engel, qui joue magnifiquement avec la scène et la caméra pour composer à fleur de peau, en deux langues à la fois – celles du théâtre et du cinéma – le saisissant tableau d’une douleur.