Les instruments de musique, avec Bernard Sève
À quelques exceptions près (Hegel, K. Levinson, St. Davies), l'instrument de musique est le grand oublié des philosophies de la musique (qui privilégient, pour des raisons complexes, la voix humaine). Or l'instrument de musique présente une originalité unique : il ne doit être confondu ni avec l'accessoire de théâtre ni avec un outil artistique (comme le pinceau du peintre), ni avec un machine (la caméra), lesquels n'ont plus à être utilisés quand l’œuvre est achevée. L'usage de l'instrument de musique est coextensif à l'existence actuelle et complète de l’œuvre musicale (écrite ou improvisée). La musique est , en ce sens, le seul art qui use d'instruments. C'est à la lumière de cette thèse que j'entends penser l'instrument, la musique, et, d'une certaine façon, les autres arts (qui ne se servent pas d'instruments à la façon de la musique). Mais c'est bien la musique et ses instruments qui sont au cœur du livre.
L'humanité dispose, dans les milliers d'instruments de musique qu'elle a inventés, d'un extraordinaire archivage matériel de ses techniques, des formes de sa sensibilité, de ses croyances et de ses rêves. Le livre entend faire droit à cette richesse, qu'il entend penser : penser, philosophiquement, le statut ontologique et esthétique de l'instrument de musique, dans son lien notamment avec la question de l'écriture, du temps musical, de la technique, de l'histoire, de l'interprétation, de l'ontologie de l’œuvre musicale.
Bernard Sève est professeur d'esthétique et de philosophie de l'art à l'Université Lille-3. Il a, entre autres, publié La Question philosophique de l'existence de Dieu (PUF, 1994, 2ème édition revue, 2000) ; L'Altération musicale, ou ce que la musique apprend au philosophe (Seuil, collection Poétique, 2002) ; Montaigne. Des règles pour l'esprit (PUF, collection Philosophie d'aujourd'hui, 2007).