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Orlando : une biographie paraît en octobre 1928 à Londres. Comme le qualifie son auteur, il s’agit d’une parodie, un roman pour s’amuser, commencé « comme une plaisanterie ». Le roman est illustré comme s’il s’agissait d’une vraie biographie par quelques œuvres anciennes et trois photos de Vita Sackville-West déguisée. Vita à qui l’œuvre est dédiée, et qui fut le modèle du personnage Orlando. À noter que le prénom de la dédicataire, Vita, signifie en latin « vie »... ou « biographie ».

 

Virginia Woolf ne s’attendait certainement pas au succès international d’Orlando. Ses premières inquiétudes débutèrent lorsque son mari Leonard entreprit la lecture du manuscrit, fin mai 1928, et qu’elle s’aperçut qu’« il le prenait plus sérieusement qu’elle s’y attendait » (Journal d’un écrivain, 31 mai 1928).
Lors de sa parution, la critique du NewYork Times salua l’ouvrage pour son expérimentation littéraire, « une application à l'écriture de la théorie de la relativité d'Einstein ».
En décembre 1928, Orlando en était déjà à sa troisième édition, 6000 exemplaires avaient été vendus, et le roman allait permettre au couple Woolf de vivre un peu plus à l’aise.

 

En avril 1930 Virginia Woolf reçut un télégramme de ses éditeurs américains l’avertissant que « quelqu'un souhaitait monter une pièce à partir d'Orlando et qu'il lui offrait la moitié des bénéfices » !
Mais les archives américaines sont muettes au sujet de ce projet, qui semble ne pas avoir abouti.

Après ce premier succès, le roman semble cependant passer de mode, en particulier après la guerre, et ce n’est qu’en 1992 que le metteur en scène américain Robert Wilson se saisit à nouveau d’Orlando pour en réaliser une adaptation scénique (par Daryl Pinckney) : une version sous forme de monologue minimaliste, interprété d’abord par Miranda Richardson en 1989, puis Jutta Lempe à la Schaubühne de Berlin la même année, Isabelle Huppert en 1993 (au Théâtre Vidy-Lausanne puis à l’Odéon dans le cadre du Festival d’Automne) et Wei Hai-min en 2009 dans une nouvelle version pour l’Opéra de Taïwan.


Quasiment au même moment, en 1992, la réalisatrice anglaise Sally Potter adapte Orlando pour le cinéma, avec Tilda Swinton dans le rôle-titre. La reine Élisabeth 1re y est interprétée, en travesti, par un acteur masculin, Quentin Crisp.

 

Une deuxième adaptation théâtrale d'Orlando, par Sarah Ruhl, a été présentée pour la première fois par le Piven Theatre Workshop à Evanston, Illinois (USA), en 1998. La pièce Off-Broadway sera créée à New York en 2010, puis rapidement publiée. Elle est depuis lors très régulièrement montée dans tous les pays anglo-saxons.

 

Une troisième version, adaptation très contemporaine d’Orlando écrite et interprétée par Lucy Roslyn, a vu le jour en 2019, remportant un prix au VAULT Festival de Londres et un franc succès au Fringe d’Edimbourg.

Même en dehors du monde anglo-saxon, on constate de récentes adaptations scéniques, comme celle présentée en 2017 au Théâtre National de Grèce de Nord, ou encore celle créée en novembre prochain à Valence en Espagne.

 

Signe, décidément, de l’air du temps, en 2016 la maison de couture Burberry's s’inspire d’Orlando pour sa collection automnale unisexe. Et pourquoi pas puisque qu’Orlando s’amuse beaucoup à se déguiser : lorsqu’il reçoit la visite de la Reine, il s'empresse d'enfiler en son honneur « des culottes cramoisies, un col en dentelle, un gilet de taffetas et des chaussures à rosettes de la taille d'un double dahlias ».
En 2019, Rei Kawakubo, directrice de Comme des garçons, dédie elle aussi son défilé de mode à Orlando. Elle conçoit également les costumes de l’opéra Orlando – par la compositrice Olga Neuwirth – qui sera présenté à Vienne en décembre 2019.

 

Au-delà du roman, la relation amoureuse entre Virginia Woolf et Vita Sackville-West a aussi fait l’objet d’un film réalisé par l’anglaise Chanya Button, sorti en juillet 2019, et qui s'inspire de la pièce de théâtre Vita & Virginia d'Eileen Atkins.