Que la saison 21-22 soit celle de la renaissance et d’une reprise enthousiaste, c’est le vœu que je forme aujourd’hui.
Les théâtres ont pris de plein fouet la crise sanitaire. Nos salles ont été fermées des mois durant. Plus de trois-cent-cinquante représentations ont été annulées à l’Odéon et à Berthier, et plus de cinquante autres en tournée. Les subventions et les dispositifs d’aide de l’État nous ont permis plus qu’à d’autres de tenir le choc économique, mais les pertes pour le public et les artistes en termes de sens, de poésie, d’intelligence sensible, sont inestimables.
Pendant cette triste période sans public, nous n’avons pourtant pas cessé de répéter, de créer, de rêver. Les équipes artistiques qui ont eu la chance de pouvoir travailler ont fédéré toutes leurs énergies, leur courage, leur ténacité, tout en sachant que les premières n’auraient pas lieu, du moins pas tout de suite. Les Frères Karamazov, Comme tu me veux, Entre chien et loup, Le Ciel de Nantes, La réponse des Hommes, Antoine et Cléopâtre, tous ces spectacles que vous auriez dû voir la saison dernière sont prêts, nous les avons reprogrammés et ils n’attendent plus que vous pour enfin exister.
Mais cette nouvelle saison se doit d’être aussi une fête de la création, une saison exceptionnelle : nous vous présenterons également neuf nouveaux spectacles.
Pour la première fois, du fait des reports, nos quatre artistes associés partageront la même affiche de saison : Christiane Jatahy avec Entre chien et loup, une fable sur le fascisme adaptée du film de Lars von Trier Dogville ; Sylvain Creuzevault, qui poursuit avec Les Frères Karamazov son exploration jubilatoire et farcesque de l’œuvre de Dostoïevski ; Caroline Guiela Nguyen qui, après Saigon, devrait nous bouleverser avec sa nouvelle création Fraternité, conte fantastique ; et enfin Alexander Zeldin qui créera – pour la première fois en français – sa nouvelle pièce Une mort dans la famille.
Côté européen, nous nous réjouissons de voir revenir à l’Odéon Thomas Ostermeier avec son adaptation spectaculaire du premier tome de Vernon Subutex de Virginie Despentes, et à Berthier les Italiens Daria Deflorian et Antonio Tagliarini avec l’une de leurs créations si pleines de poésie et d’humour, cette fois inspirée de Ginger & Fred, l’avant-dernier film de Fellini. Nous présenterons également, pour la première fois à l’Odéon, le travail du metteur en scène portugais Tiago Rodrigues, La Cerisaie de Tchekhov, avec notamment Isabelle Huppert et une troupe d’actrices et d’acteurs d’horizons divers.
Nous retrouverons aussi ces artistes français de toutes générations qui ont déjà stupéfait le public de l’Odéon-Théâtre de l’Europe : Julien Gosselin avec Le Passé, d’après le grand auteur russe méconnu Léonid Andréïev ; Julie Duclos avec Kliniken de Lars Norén, le plus célèbre des auteurs suédois contemporains ; Séverine Chavrier avec son adaptation de La Plâtrière de Thomas Bernhard, un auteur qui lui a déjà inspiré une de ses plus belles réussites (Nous sommes repus mais pas repentis, présenté aux Ateliers Berthier en 2016) ; Alain Françon, qui reviendra à Marivaux avec La Seconde Surprise de l’amour ; et bien sûr Tiphaine Raffier, Célie Pauthe et Christophe Honoré, dont j’ai déjà mentionné les spectacles reportés.
Pour ma part, je pourrai enfin vous présenter Comme tu me veux de Pirandello, cette fable sur les traumas et leurs conséquences dans la période si trouble des années 20, peut-être plus d’actualité encore que la saison passée…
Parce que nous savons que le théâtre vous a tant manqué, parce qu’il ouvre des fenêtres sur le monde, des perspectives insoupçonnées qui enjambent les frontières et décloisonnent nos vies, dès septembre, l’Odéon fait son festival !