Avec
Vasiliki Driva, Dimitris Lagos, Eftychia Stefanou, Angeliki Stellatou, Fotis Stratigos, Panagiota Yiagli
Qu’est-ce qui unit une mère à son fils ? Nourri par les souvenirs de son enfance, partagée entre l’Albanie et la Grèce, Mario Banushi détricote le maillage complexe tissé autour du vocable « mami » (« maman » en albanais) et des nombreuses figures maternelles qu’il a successivement désignées : sa grand-mère, qui l’a élevé jusqu’à ses six ans, sa propre mère qu’il rejoint ensuite à Athènes, sa belle-mère, Lindita, mais peut-être aussi toutes les autres femmes qui se sont occupées de lui comme d’un fils. Soutenu par un travail visuel, qui exhausse les corps pour les ériger en icônes, Mario Banushi traduit, au-delà du langage articulé, les émotions contrariées de l’amour filial.
Générique
mise en scène, dramaturgie
Mario Banushi
scénographie, costumes
Sotiris Melanos
musique, son
Jeph Vanger
lumière, dramaturge associé
Stephanos Droussiotis
collaborateurs artistiques
Aimilios Arapoglou, Thanasis Deligiannis
assistanat à la mise en scène
Theodora Patiti
collaboration
Marietta Pavlaki, Kostas Chaidos, Sofia Theodorou, Nikoleta Anastasiadou
relations internationales
Nikos Mavrakis
Mami a été commandé et produit par Onassis Stegi
coproduction
Berliner Festspiele (Berlin), Odéon Théâtre de l’Europe,
FOG festival, Triennale Milano Teatro, & EspooTheatre, Festival d’Avignon, Grec Festival (Barcelone), Théâtre de Liège, Noorderzon Festival / Grand Theatre Groningen
recherche et développement initiaux avec le soutien de Onassis AiR Fellowship — Grèce et le Centre culturel Hellénique — Paris
avec le soutien de Onassis Stegi “Outward Turn” Cultural Export Program
avec le soutien financier du ministère de la culture de Grèce
cinq dates
3 octobre 2021 Ce fut, même si je ne le savais pas encore, le début d’une transformation profonde.
Ce jour-là, j’ai compris pour la première fois ce que signifiait perdre un être cher. Le jour où j’ai appris que ma belle-mère, Lindita, était décédée. J’ai senti, à ce moment-là, quelque chose grandir trop vite en moi. J’ai compris que rien n’est immuable. Rien n’est garanti. Quelques jours plus tard, mon père est mort. Ces deux pertes sont à l’origine de Goodbye Lindita, ma première création dramatique. Une pièce très personnelle qui m’a permis, dans une certaine mesure, de faire mon deuil sans être complètement seul. De pleurer aux côtés de mes collaborateurs. Et avec toutes les personnes qui ont vu et verront ce spectacle.
16 mai 2022 Du 1er au 15 mai, j’ai présenté ma première mise en scène (Ragada) à Athènes, dans une maison que nous avons transformée en scène de spectacle pour l’occasion, car aucun théâtre ou espace de jeu ne voulait me faire confiance, répondant toujours à ma proposition de jouer dans leur salle que je manquais d’expérience et que c’était risqué de me programmer sans que mon travail ait été présenté auparavant. Ainsi, après beaucoup d’efforts et d’épuisement, le jour est enfin venu de jouer Ragada dans cet appartement. Le 15 mai, dernier jour des représentations, on reçoit un coup de téléphone : on nous demande s’il reste une place pour voir le spectacle. On répond qu’on est complet. Un peu plus tard, on apprend que l’appel provenait du directeur du Théâtre National de Grèce. On le rappelle immédiatement et on lui dit qu’on va lui trouver une place… Le lendemain, le 16 mai, après avoir vu le spectacle la veille, je reçois un appel du Théâtre National me proposant de mettre en scène une pièce. Je n’oublierai jamais ce sentiment de joie pure et de victoire, après tant de refus, de personnes qui « craignaient » de prendre des risques. Tout à coup, le Théâtre National de votre pays vous appelle pour vous demander de mettre en scène une pièce. Après cet appel, j’ai pris une photo de moi en pleurs, pour ne jamais oublier ce que j’ai ressenti à ce moment-là.
Décembre 2003 C’est sans aucun doute l’un des moments les plus importants de ma vie, car c’est le moment où ma mère m’a ramené en Grèce depuis l’Albanie, où j’avais été élevé par ma grand-mère. Je me souviens encore de cette journée dans les moindres détails, le moment où on est venu me chercher chez ma grand-mère, et j’ai fait semblant de dormir alors que j’étais éveillé, parce que je ne supportais pas l’idée d’être séparé de celle que j’appelais « maman »… ma mère qui me portait et moi qui me demandais : « Où allons-nous ? » Et le moment où on est arrivé à Athènes, entièrement décorée pour Noël… toutes ces lumières qui me faisaient peur, je n’avais jamais rien vu d’aussi grand. Je regardais la ville depuis le taxi, et je n’oublierai jamais cette impression, cette impression de « Où suis-je ? ». L’impression que cette ville allait m’engloutir. Au fil des années, je suis tombé amoureux de cette ville et je n’ai plus jamais eu peur qu’elle m’engloutisse, mais à chaque fois que je retournais en Albanie l’été, j’éprouvais un sentiment profond d’amour et de soulagement.
Septembre 2006 Albanie, été, juillet J’étais devant la taverne de mon père, le soir, les enfants jouaient dans la rue et j’étais fasciné par une lampe, une de celles qui décoraient la taverne. Cette lampe qui me fascinait n’avait pas de globe protecteur, je m’en suis approché lentement, et je l’ai touchée. C’est alors que j’ai senti un courant électrique traverser tout mon corps… Je ne m’étendrai pas sur les détails qui ont suivi, car ils sont glaçants et violents. Cette même nuit, on m’a renvoyé en Grèce par avion, car ma vie était en danger. J’ai passé plusieurs mois à l’hôpital, où j’ai subi diverses opérations, etc. Je n’oublierai jamais le jour où je suis sorti de l’hôpital après trois mois et où j’ai vu le soleil. Je me suis dit : « Que la vie est belle ». Je n’ai pas choisi septembre par hasard, même si l’évènement traumatisant cette année-là s’est produit en juillet. Je l’ai choisi parce que ce qui a finalement triomphé, c’est le sentiment que « la vie est belle. »
5 octobre 2023 Belgrade, Festival Bitef C’était la première fois que je présentais mon travail à l’étranger. Je me souviens être assis dans le public, le regardant entrer et remplir la salle, s’asseyant même sur les marches. Je me suis dit : « Nous avons réussi », et j’ai ressenti de la gratitude et du bonheur, moi qui n’avais jamais voyagé de ma vie, me retrouvant soudainement hors de Grèce, et pas en vacances…, mais pour montrer mon travail. Qu’y a-t-il de plus beau et de plus émouvant que cela ? Je n’oublierai jamais ce tournant dans ma carrière, lorsque le public, durant les dix dernières minutes du spectacle, s’est levé comme pour signifier à quel point il aimait ce qu’il regardait, et moi qui me trouvais parmi les spectateurs, les larmes aux yeux, rempli de cette sensation de beauté. Ensuite, même si j’ai ma propre théorie sur les récompenses, j’ai été très ému de recevoir les deux prix qui m’ont été décernés à l’issue de ce festival. Sentir la reconnaissance lors d’une première étape importante est quelque chose de très beau, c’est une bonne motivation pour continuer !
Infos pratiques
durée 1h10